By Hausman, Dubois
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Les grandes portes s’ouvrirent devant lui. Francesco Loredan se retourna. Vindicati avait délaissé sa tenue d’apparat pour un ample manteau noir. Emilio, perruque poudrée au-dessus d’un visage ovale, était un homme de haute stature; la maigreur de ses membres donnait l’impression qu’il flottait dans son vêtement. Ses yeux, pénétrants et mobiles, étaient souvent traversés par une lueur d’ironie, qu’accusait le pli au coin de sa bouche. Celle-ci semblait avoir été dessinée au fusain, deux traits presque invisibles, qui s’aiguisaient de temps à autre en un sourire proche du sarcasme.
Devoir oublier les fleurs de la jeunesse, le sel de ses aventures picaresques et de ses frasques mouvementées, voilà qui heurtait son tempérament. Il tournait parfois comme un lion en cage et tentait de se dominer; aussi se contraignait-il à cette hygiène quotidienne qui le faisait s’attarder des heures sur l’essai d’un costume que lui apportait Landretto, après l’avoir fait concevoir à sa demande, ou sur l’impossible résolution d’un vaste problème philosophique, sur une nouvelle stratégie pour battre aux cartes son compagnon, ou encore sur une fresque à la craie qu’il dessinait contre l’un des murs de sa prison.
Au sein de cet édifice centralisé, le Conseil des Dix assumait un rôle bien particulier. Il était né de la peur du gouvernement, qui s’était peu à peu coupé de ses assises populaires. On avait longtemps vanté la stabilité politique de Venise, dont le séduisant régime empruntait à la fois aux gouvernements aristocratique, monarchique et démocratique : en fait, la peur du peuple était vivace. En relation avec la Quarantia Criminale, le « Conseil ténébreux », comme on l’appelait, était l’instrument suprême de la police vénitienne.